Le Commandement Interarmées de l’Espace (CIE)
Les moyens spatiaux dans notre
dispositif de défense sont très importants.
En plus de cinquante ans, le rôle que
tenait l’espace auprès de l’armée est devenu indispensable.
Nous sommes passés de l’arme nucléaire qui intégrait les capacités spatiales (missiles balistiques développés par les USA, URSS et la France), de la force de frappe et la dissuasion, à la planification et la conduite des opérations.
Nous sommes passés de l’arme nucléaire qui intégrait les capacités spatiales (missiles balistiques développés par les USA, URSS et la France), de la force de frappe et la dissuasion, à la planification et la conduite des opérations.
L’espace est donc devenu, non seulement
essentiel pour l’homme et ses activités en général, mais aussi essentiel pour
l’armée.
L’utilisation de l’espace permet
d’augmenter les capacités militaires sur un théâtre d’opérations.
L’utilisation maîtrisée de l’Espace est
devenu un des socles de la souveraineté nationale.
Renseignements, communications… c’est
l’acquisition d’une supériorité opérationnelle. Voilà pourquoi, les moyens
spatiaux sont aujourd’hui des moyens indispensables à la défense.
La conduite des opérations, ces
dernières années, a été largement réussie grâce au spatial (cartographie,
renseignement, ciblage, communication …) pour un commandement en temps
quasi-réel.
L’espace est un vecteur de puissance,
mais comme nous en sommes aussi très dépendant dans certains domaines (et
l’armée n’y échappe pas), c’est aussi un vecteur de vulnérabilité.
La protection, la gestion de l’espace, sont
pour les militaires indispensables. Cela permet la préservation d’une maîtrise
de capacité stratégique et opérationnelle.
C’est à ce titre qu’a été créé le 1er
juillet 2010, le Commandement Interarmées de l’Espace (CIE).
‘’Donnant la
capacité de voir, écouter, communiquer, alerter, localiser et synchroniser, à
l'échelle mondiale et avec une disponibilité permanente, les satellites ont un
rôle majeur dans la maîtrise de l’information dans les phases d’appréciation de
situation, de préparation et d’action.
L'espace permet
d'agir vite, de façon globale et sans dépendre de tiers. Les moyens spatiaux
offrent l'avantage d'être non intrusifs, non coercitifs, ni oppressifs : ils ont
cette spécificité d'opérer dans un milieu libre de circulation où les
contraintes de souveraineté ne s'exercent pas. Ces moyens permettent, en toute
autonomie, l'accès à tout lieu du globe en un temps limité avec une certaine
discrétion et une grande répétitivité’’.
‘’ Le Commandement Interarmées de
l’Espace a pour rôle de répondre à la dimension stratégique croissante du
milieu extra-atmosphérique’’
(Livre blanc sur la Défense et la
sécurité publique, 2008).
Le commandement du CIE est exercé par
tutelle, pour le chef d’Etat-Major des Armées (EMA), par le sous-chef
opérations de ce même EMA, actuellement le Général de brigade aérienne Yves
Arnaud.
‘’Point d'entrée des armées pour toutes les
questions spatiales militaires, le CIE veillera à assurer la disponibilité des
capacités spatiales au profit de nos forces armées engagées en opérations et au
bénéfice de nos hautes autorités afin qu’elles puissent prendre en toute
autonomie les décisions qui leur incombent’’.
(Général Yves Arnaud)
L’action du CIE porte sur l’ensemble des
capacités spatiales nationales de la défense, quelles soient civiles,
militaires ou commerciales.
(Crédit : Ministère de la Défense) |
Pour exercer son mandat, le CIE repose
sur 4 grandes fonctions opérationnelles : Naviguer, Observer, Surveiller
et Communiquer.
Naviguer :
Fonction indispensable, car cela permet la radiocommunication par satellites pour la localisation, la navigation et le guidage de beaucoup de systèmes d’armes.
La maîtrise de cette fonction permet la
synchronisation entre l’information, la communication et le commandement.
La couverture est mondiale grâce
à :
- GPS
(Global Positioning System) de l’US Air Force en service depuis 1994
- Glonass
développé par la Russie, en service et avec une forte montée en puissance
actuellement grâce au téléphone portable
- Galileo
développé par l’Europe et qui devrait être pleinement opérationnel d’ici 2020.
Galileo permettra également une complémentarité avec le GPS (notamment dans le
PNT : Position, Navigation, Temps) et offrira un plus grand partenariat
avec les USA.
- BeiDou
/ Compass développé par la Chine et qui sera pleinement opérationnel aussi vers
2020 (il existe un accord de coopération avec Galileo).
Observer :
C’est la Direction du Renseignement Militaire (DRM) qui est en charge du contrôle opérationnel des satellites d’observation.
Grâce à une coopération européenne, le
Ministère de la Défense peut disposer de plusieurs satellites d’observation,
tant français, allemands ou italiens (et réciproquement pour ces pays), que ce
soit des satellites d’observation optique ou radar. Ces satellites profitent
également à la Belgique, l’Espagne et la Grèce.
Ce système d’observation est composé de
SSO (Segment Sol Observation) qui comprend les satellites et tout ce qui permet
de travailler avec, comme les centres de réception au sol (Segment Sol), les
équipes, les logiciels, la gestion et le traitement des images.
Pour ce programme SSO, les satellites
suivants sont utilisés :
-
2
satellites Helios II-A et II-B et 2 satellites Pléiades : France /
Satellites optiques
-
5
satellites SAR-Lupe : Allemagne / Satellites radar
-
4
satellites COSMO-Skymed : Italie / Satellites radar
Cet ensemble de satellites et ce
programme permet pour le Ministère de la Défense d’avoir une capacité
d’observation totale de la Terre, de jour comme de nuit.
Satellite Helios II-A et II-B :
Le programme Helios a débuté en 1995 et
Helios II-A et II-B succèdent aux Helios I-A (1995) et I-B (1999).
Helios II-A a été lancé le 18 décembre
2004 par une Ariane et II-B le 18 décembre 2009, toujours par une Ariane (en
orbite héliosynchrone basse à 675 km).
(Crédit : CNES / Mira Productions) |
Les satellites Pléiades :
Les deux satellites, Pléiades-1A et
Pléiades-1B, ont été lancés de Kourou respectivement le 17 décembre 2011 et le
2 décembre 2012 par un lanceur Soyouz. Les deux satellites ont été construit par Astrium et les instruments ont été fournis par Thales Alenia Space.
Ils sont en orbite héliosynchrone à 694
km.
(Crédit : Thales Alenia Space) |
Satellite SAR-Lupe :
Les cinq satellites allemands SAR-Lupe
sont identiques. Ils ont été tous lancés depuis le cosmodrome de Pletsek en
Russie entre décembre 2006 et juillet 2008 par un lanceur Cosmos-3M.
Ces satellites pèsent plus de 750 kg
chacun et ont été construit par OHB-System AG.
Ils ont été placés sur 3 orbites
héliosynchrones à 500 km.
Leur technologie radar (RSO = Radar
Système d’Ouverture ou SAR en anglais) permettent d’acquérir des images quelque
soit les conditions météorologiques (et aussi très efficace pour capter les
ondes au-dessus de l’eau).
(Crédit : Ministère de la Défense) |
Satellite COSMO-Skynet :
Les quatre satellites italiens
COSMO-Skynet (Constellation de petits satellites pour la surveillance du bassin
méditerranéen) utilisent comme les SAR-Lupe allemands une imagerie par radar
RSO (voir plus haut).
Les quatre satellites ont été lancés
depuis la base américaine Vandenberg en 2007 (2 lancements), 2008 et 2010, par
une Delta II.
En 2014, sera mis en place GEODE 4D (GEographie, hydrographie, Océanographie et météorologie de DEfense en 4 Dimensions). Cela permettra de mieux connaitre et comprendre l’environnement géophysique des théâtres d’opérations. Les satellites utilisés serons Musis, Pléiades et Spot 6 et 7.
Surveiller :
Surveiller l’espace est une nécessité.
Maintenant, nous sommes dépendants des satellites et outils spatiaux.
Les satellites peuvent être victimes de
plusieurs ‘’menaces’’ :
-
Environnement
extrême que représente l’espace
-
Risque
de collisions des débris incontrôlables
-
Tirs
antisatellite (Asat), que sont capables de réaliser les USA et la Chine
Il faut donc contrôler et surveiller cet
environnement spatial, et se protéger.
Si la France a limité l’armement
antisatellite (entre autre par crainte
de polluer encore plus l’espace avec des débris), elle a développé
d’autres moyens de se protéger :
-
Cyber-attaque,
et la guerre électronique
L’Armée de l’Air et le CNES se partagent
les tâches de manœuvres, de programmation et de surveillance afin de permettre
à la France de préserver ses moyens spatiaux (la collision avec un débris est
le risque majeur).
Communiquer :
C’est le Centre national de mise en
œuvre des moyens satellitaires, basé à Maisons-Laffitte (78), qui s’occupe de
la gestion opérationnelle des systèmes de communications.
Il veille 24 h / 24 h et 7 jours / 7 à
ce qu’il y ait toujours un moyen de communication entre le Ministère de la
Défense à Paris et les forces engagées à l’extérieur.
C’est grâce au système Syracuse 3 (ou III) que cela est possible (SYstème de
RAdiocommunications Utilisant Un SatellitE). Syracuse s’appuie sur une flotte
de deux satellites Syracuse 3A et 3B. Dans le cours de l’année, le satellite
Sicral devrait s’ajouter à ceux-ci.
Syracuse est insensible au brouillage et
à une très forte capacité de transmission rapide. Syracuse est le
‘’système-cœur’’ des télécommunications militaires.
Les satellites de Syracuse fonctionnent
en moyen débit, et Sicral (Syracuse 3c fabriqué par l’Italie) permettra le haut
débit pour des infos moins sécurisées mais tout aussi utile. Le satellite
Athena, construit aussi par l’Italie, aidera aussi dans la transmission en haut
débit. Sicral et Athena doivent être lancés cette année.
C’est la troisième génération de ce
système débuté en 1980.
Syracuse 3A a été lancé le 13 octobre
2005 depuis Kourou par une fusée Ariane 5 GS (Vol n° 168). C’est Thales Alenia
Space qui a construit le satellite à Cannes Mandelieu.
Le satellite mesure environ deux mètres
sur trois avec une envergure de 30 mètres panneaux solaires déployés.
Il est en orbite géostationnaire à 47°
de longitude est.
(Syracuse 3A - Vue d'artiste / Crédit : Thales) |
Syracuse 3B est la copie conforme de 3A.
Il a été lancé le 11 août 2006 par une Ariane 5 ECA (vol n° 172).
Il est utilisé également pour le secteur
militaire maritime avec Telcomarsat en complément (qui utilise des satellites
commerciaux).
Le Futur
La guerre aujourd’hui se fait sur quatre
champs d’affrontements : aéroterrestre, aéromaritime, cybernétique et
spatial.
Dans un contexte d’économie en crise, la
coopération entre pays souhaitant obtenir des capacités spatiales est devenue
aussi indispensable. Avec chacun leur spécificité en besoin spatial, cette
coopération permet une complémentarité des programmes entre pays alliés.
Cette coopération internationale a
permis au niveau européen de créer, en 1993, le Centre Satellitaire de l’Union
Européenne (CSUE). Basé en Espagne près de Madrid, sur la base aérienne
Torrejon de Arsoz.
(Dessin d'artiste du CSUE / Crédit : Ministère de la Défense) |
Ses missions principales sont de
soutenir les décisions de l’Union Européenne pour la Politique Européenne de
Sécurité Commune (PESC) et de contribuer au soutien des opérations civiles et
militaires de l’Union Européenne en temps quasi réel par son nouveau Service
Européen d’Action Extérieure (SEAE).
L’autonomie d’action stratégique et
politique de l’Union Européenne doit beaucoup au CSUE et son SEAE.
Prévention, aide à la décision,
planification et conduites des opérations militaires et civiles se font donc
grâce au Centre Satellitaire de l’Union Européenne, qui pour ce faire, achète
auprès d’opérateurs privés (Astrium, GeoEye, Digital Globe, etc…) des images
mais aussi se fait transmettre les images des systèmes militaires nationaux. En
effet, l’Union Européenne ne possède pas de satellites propres d’imagerie.
En 2016, le programme international
MUSIS (MUltinational Space-based Imaging System for surveillance,
reconnaissance and Observation) remplacera peu à peu les satellites Helios,
SAR-Lup et COSMO-Skymed, par des satellites CSO (Composante Spatiale Optique)
qui seront développés par la Direction Générale de l’Armement et par le CNES.
CSO étant la partie française et aura
pour fonction une optique très précise. L’Espagne fournira Ingenio qui répondra
à une optique grand champ, l’Allemagne fournira Sarah et l’Italie une deuxième
génération de COSMO-Skymed, tous deux des satellites radar.
La CIE continue de développer le projet
Ceres (Capacité Roem Spatial)** qui a pour objectif de détecter et localiser
depuis l’espace les signaux électromagnétiques envoyés par les systèmes
adverses dans toutes les zones du monde.
Il devrait être opérationnel vers 2020.
L’intérêt de Ceres est une capacité de
surveillance étendue. Seule la détection des signaux sera prise en compte sans
écoute des télécommunications.
(Ceres / Crédit ; CNES - DGA) |
Pour préparer Ceres, quatre
microsatellites Elisa ont été lancés le 16 décembre 2011 depuis Kourou par une
fusée Soyouz. Ils sont dans la continuité des démonstrateurs de renseignements
électromagnétiques, comme Cerise (1995), Clémentine (1999) ou Essaim (2004). Le
rôle principal ces microsatellites est l’interception des émissions des radars.
C’est la DGA qui a la charge de ces
microsatellites, mais c’est le CNES qui est responsable des satellites et des
moyens de commande.
(Plateforme Elisa / Crédit : Astrium) |
** ROEM (Renseignement Origine
ElectroMagnétique).
Sources :
·
Ministère
de la Défense / Commandement Interarmées de la Défense
·
CNES
·
L’Espace
au service des opérations par Les Cahiers de la Revue Défense Nationale (2ème
trimestre 2011)
·
Stratégie
spatiale Penser la guerre des étoiles : une vision française par le Colonel
Jean-Luc Lefebvre (collection Stratégie et Défense aux éditions L’esprit du
Livre juin 2011)
·
Revue
Armées d’Aujourd’hui
· Astrium
· Thales
Alenia Space
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