CLAP DE FIN POUR LA MISSION ROSETTA
Space Quotes - Souvenirs d'espace a inauguré une nouvelle formule pour relater la fin de la mission Rosetta ce vendredi 30 septembre 2016. Grâce à des amis collaborant à l'article, nous avons pu donc nous trouver à trois endroits à la fois : Au Centre de Contrôle de l'ESA (ESOC) à Darmstadt (Allemagne) grâce à Géraldine, à la Cité de l'Espace à Toulouse grâce à Charlyne (10 ans), Céline et Arnaud, puis moi-même à Paris à la Cité des Sciences et de l'Industrie.
- Clap de fin pour Rosetta depuis Darmstadt
- Clap de fin pour Rosetta depuis la Cité de l'Espace
- Clap de fin pour Rosetta depuis Darmstadt
- Clap de fin pour Rosetta depuis la Cité de l'Espace
Avant de revenir sur cette fin de mission, et l'ambiance qu'il y avait dans ces trois lieux, je vous propose de vous replongez dans les temps forts de cette magnifique mission Rosetta/Philae (cliquez sur les liens en bleu) déjà publiés par Space Quotes - Souvenirs d'espace :
- Mission, lancement, Réveil et mise en orbite de Rosetta (2 mars 2004 au 6 août 2014)
- Sélection du site J pour l'atterrissage de Philae (15 septembre 2014)
- Atterrissage de Philae (12 novembre 2014)
- Interview de Stephan Ulamec (Program Manager pour la DLR de Rosetta / Philae)
- Interview d'Andrea Accomazzo (Flight Director)
- Interview d'Elsa Montagnon (Deputy Flight Director)
- Interview d'Armelle Hubault (Rosetta Operations Engineer)
- Réveil de Philae (13 juin 2015)
C'est donc ce vendredi 30 septembre 2016 à 10h39 UTC exactement (12h39 heure de Paris) qu'a pris fin la mission Rosetta. Mais avec les 40 minutes de délai de transmissions des données (à plus de 700 millions de km de la Terre, les signaux mettent 40 minutes à nous parvenir en vitesse lumière), ce n'est qu'à 11h19 UTC (13h19 à Paris) que les écrans de la salle de contrôle de Darmstadt ont confirmé le crash contrôlé de Rosetta pour son ultime action : une sorte de baiser d'adieu à la comète 67P/Tchuriumov-Gerasimenko.
Rosetta s'est éteinte définitivement à 3,2 km/h (90 cm par seconde) sur une région de la comète appelée Ma'at (au niveau du petit lobe), un endroit où se trouvent beaucoup de puits de dégazage. L'Agence Spatiale Européenne (ESA) avait prévu la coupure totale et automatique de tous les transmetteurs et système de transmissions de Rosetta dès qu'elle toucherait le sol. C'est donc à l'observation de l'effondrement du graphique du signal (ressemblant à un électrocardiogramme), au tracé plat de celui-ci, que nous avons pu savoir que Rosette avait accompli son ultime action non sans nous avoir livré une dernière image prise par la caméra OSIRIS à 20 mètres du sol environ.
Comme l'a dit Roger-Maurice Bonnet depuis Darmstadt, << Rosetta est une formidable réussite scientifique, technique, européenne, et aussi une réussite humaine et financière. >>
Quelques chiffres-clés permettent de mesurer pleinement la GRANDE mission qu'a été Rosetta :
- Programme en route depuis près de 25 ans
- 12 ans de mission depuis son lancement
- plus de 500 scientifiques et ingénieurs mobilisés en Europe
- plus de 300 000 heures de travail consacrées à la mission
- coût de 250 millions d'euros sur 20 ans
- plus de 6,5 milliards de km parcourus
- 116 000 clichés transmis
- des découvertes extraordinaires
- du travail d'analyses pour les 10-20 prochaines années encore
La Cité des Sciences et de l'Industrie à Paris organisait aussi un événement avec le public pour la fin de la mission Rosetta : Rosetta la dernière séance.
Réuni autour de l'ami Gilles Dawidowicz qui présentait cette séance, plusieurs experts et ingénieurs travaillant au programme Rosetta / Philae sont venus expliquer à un public très nombreux (l'amphithéâtre de près de 400 places était plein) ce que la mission avait apporté comme connaissances nouvelles sur les comètes en général et cette comète en particulier. Plusieurs duplex ont également eu lieu avec Darmstadt où l'ami Frédéric Castel interviewait aussi certains experts sur place.
Je ne vais pas tout vous retranscrire, car vous trouverez leurs interventions sur le Replay de la Cité des Sciences et de l'Industrie, mais plutôt une ambiance photos de ce que nous avons vu et quelques impressions des personnalités présentes.
Les communications avec Darmstadt ont été au début un peu difficile, ce qui fit dire à un Gilles Dawidowicz amusé : << La communication marche mieux entre la Terre et Rosetta qu'entre Paris et Darmstadt. >> puis finalement tout est rentré dans l'ordre.
Mais je dois dire que, même si l'émotion des personnes ayant travaillé sur ce programme était là, il n'y avait pas la même ambiance que lors du réveil de Rosetta ou de l'atterrissage de Philae. Une ambiance plus feutrée, et plus technique régnait à Darmstadt et à la Cité des Sciences et de l'Industrie.
Discutant un peu avant le début avec Francis Rocard, responsable au CNES du programme d'exploration spatiale, celui-ci déclare : << C'est certain que nous aurons tous une boule dans la gorge au moment de l'impact qui nous signifiera la fin de la mission. >>
<< 67P est une comète extrêmement froide. Elle n'a pas évoluer, ou si peu, depuis sa naissance. On a un objet qui est resté tel quel, et ça, c'est extrêmement enrichissant. >>
<< Une comète, c'est un objet petit. Ce sont des objets qui sont riches en carbone et en glace. C'est unique et extrêmement bien préservé, à l'inverse des astéroïdes qui sont des objets riches en cailloux avec du silicate. On s'intéresse aux composés très primordiaux de ces objets que sont les comètes. >>
J'ai pu aussi converser un peu avant avec Nicolas Biver : << Rosetta va arriver sur une partie de la comète qui n'est pas très loin de l'endroit où Philae s'est posé. >>
Pourquoi avoir choisi cet endroit, la région Ma'at ?
<< Il a été choisi d'une part pour des contraintes de navigation, afin que la sonde reste en permanence en communication avec la Terre, et qu'elle reste aussi face au soleil. Et d'autre part, parce qu'il y a des puits de dégazage sur la croûte qui vont peut-être nous donner un aperçu sur la structure interne de la comète dans les parois de ces puits.
On va prendre des images jusqu'au dernier moment, et on espère avoir des images de résolution millimétriques de cette structure interne de la comète pour en apprendre encore plus. >>
Qu'est-ce qui le plus surpris sur la surface de 67 P ?
<< La plus grande surprise a été la typographie à laquelle on ne s'attendait pas du tout ! On pensait avoir une surface lisse sans trop de structures et en fait on avait surtout un terrain qui est extrêmement riche, qui est fascinant ! >>
Grâce à Philippe Kletzkine, ancien responsable du projet Philae pour l'ESA, nous apprenons que la comète << dégaze beaucoup dont environ l'équivalent de deux cuillères à soupe d'eau/glace chaque seconde. D'ailleurs, les puits de dégazage intéressent beaucoup les scientifiques et c'est une des raisons du choix d'atterrissage / acométissage de Rosetta qui en possède beaucoup à proximité. >>
Francis Rocard nous explique une grande première de cette mission : << On a trouvé pour la première fois un acide aminé sur une comète : de la glycine. >>
<< On a trouvé aussi de l'oxygène moléculaire qui s'est formé dans de minuscules grains de glace. >>
Nicolas Biver qui travaille sur l'instrument MIRO nous parle de la composition de la comète et des saisons sur celle-ci.
Pierre Drossart du LESIA et responsable de l'instrument VIRTIS
<< Cette dernière séance est pour moi très émouvante - je travaille sur ce projet depuis plus de 20 ans ! >>
Il nous explique le phénomène de dégazage et de jets de poussières de la comète.
Nicolas Fray, Maître de conférence au LISA aborde un sujet hautement technique au niveau de la chimie de la comète mais Ô combien passionnant (comme dirait Gilles Davidowicz, ça donne envie de reprendre des cours de chimie).
Il nous parle de la chimie organique, des molécules gazeuses, du concept du fameux ''zoo cométaire'' (j'ai tout compris maintenant), bref de toute la diversité chimique de 67P.
<< Il y a de la matière organique sur le noyau. Grâce à Rosetta, on est passé de 20-25 molécules connues sur les comètes à plus de 60 aujourd'hui ! >>
Marc Chaussidon, Directeur de l'Institut de Physique du Globe nous explique pourquoi il faut étudier les comètes, << (...) connaissance indispensable si on veut comprendre la formation du système solaire. >>
Thierry Martin du SONC nous explique tout ce qu'il ya à savoir sur la dynamique de vol et sur la problématique de se poser sur une comète.
Jan Wöerner, directeur de l'ESA, Jean-Yves Le Gall, Président du CNES et de l'IAF, et Pascale Ehrenfreund, directrice de la DLR, ont tous les trois adressés leurs voeux de réussite à Rosetta en direct depuis Guadalaraja au Mexique où ils se trouvaient pour le 67ème Congrès de l'IAF.
Jean-Loup Bertaux du Latmos nous a longuement expliqué la composition des comètes et leurs noyaux et aussi, et surtout, de la composition de 67P qu'il << adorerait manger - elle est d'une texture plus proche de la meringue que du gâteau basque. >>
Il nous a expliqué aussi qu'il y a eu de nombreux effondrements de falaises sur la comète et que c'était << absolument fascinant de voir ce monde qui se dessinait et redessinait sous leur yeux grâce à Rosetta. >>
Parmi le public présent, il y avait aussi des scientifiques comme Thérèse Encrenaz qui est astrophysicienne à l'Observatoire de Paris :
<< J'ai eu la gorge serrée quand le signal a disparu, quand le signal s'est éteint. C'est la fin d'une formidable aventure collective, scientifique, humaine. >>
<< Il y en a pour plus de dix ans de travail d'analyses de données avec Rosetta. J'ai travaillé sur les données de la comète de Halley (en 1986), et nous avons eu dix ans de travail, alors là, imaginez la somme d'informations et de données reçues pendant les deux ans de la mission de Rosetta en orbite. >>
La fin de cette séance nous a permis de découvrir de fabuleuses images en 3D de la surface de 67P/Tchurioumov-Gerasimenko grâce au travail incroyable d'Olivier de Goursac.
Claudie Haigneré a ajouté quelques mots lors de la fin de ce moment riche en émotions, remerciant les équipes de Rosetta, et lançant un vibrant appel à la science, et à l'intérêt qu'elle doit susciter auprès des jeunes.
Outre l'aspect scientifique, un des autres grands succès de la mission Rosetta / Philae est l'intérêt suscité auprès du public. Et le public présent ce jour-là a aussi été très ému lorsque la fin de mission a pris physiquement forme avec ce tracé plat...
La Cité des Sciences et de l'Industrie à Paris organisait aussi un événement avec le public pour la fin de la mission Rosetta : Rosetta la dernière séance.
Réuni autour de l'ami Gilles Dawidowicz qui présentait cette séance, plusieurs experts et ingénieurs travaillant au programme Rosetta / Philae sont venus expliquer à un public très nombreux (l'amphithéâtre de près de 400 places était plein) ce que la mission avait apporté comme connaissances nouvelles sur les comètes en général et cette comète en particulier. Plusieurs duplex ont également eu lieu avec Darmstadt où l'ami Frédéric Castel interviewait aussi certains experts sur place.
Je ne vais pas tout vous retranscrire, car vous trouverez leurs interventions sur le Replay de la Cité des Sciences et de l'Industrie, mais plutôt une ambiance photos de ce que nous avons vu et quelques impressions des personnalités présentes.
(Dernier briefing entre le modérateur et les invités) |
Mais je dois dire que, même si l'émotion des personnes ayant travaillé sur ce programme était là, il n'y avait pas la même ambiance que lors du réveil de Rosetta ou de l'atterrissage de Philae. Une ambiance plus feutrée, et plus technique régnait à Darmstadt et à la Cité des Sciences et de l'Industrie.
Discutant un peu avant le début avec Francis Rocard, responsable au CNES du programme d'exploration spatiale, celui-ci déclare : << C'est certain que nous aurons tous une boule dans la gorge au moment de l'impact qui nous signifiera la fin de la mission. >>
<< 67P est une comète extrêmement froide. Elle n'a pas évoluer, ou si peu, depuis sa naissance. On a un objet qui est resté tel quel, et ça, c'est extrêmement enrichissant. >>
<< Une comète, c'est un objet petit. Ce sont des objets qui sont riches en carbone et en glace. C'est unique et extrêmement bien préservé, à l'inverse des astéroïdes qui sont des objets riches en cailloux avec du silicate. On s'intéresse aux composés très primordiaux de ces objets que sont les comètes. >>
J'ai pu aussi converser un peu avant avec Nicolas Biver : << Rosetta va arriver sur une partie de la comète qui n'est pas très loin de l'endroit où Philae s'est posé. >>
Pourquoi avoir choisi cet endroit, la région Ma'at ?
<< Il a été choisi d'une part pour des contraintes de navigation, afin que la sonde reste en permanence en communication avec la Terre, et qu'elle reste aussi face au soleil. Et d'autre part, parce qu'il y a des puits de dégazage sur la croûte qui vont peut-être nous donner un aperçu sur la structure interne de la comète dans les parois de ces puits.
On va prendre des images jusqu'au dernier moment, et on espère avoir des images de résolution millimétriques de cette structure interne de la comète pour en apprendre encore plus. >>
Qu'est-ce qui le plus surpris sur la surface de 67 P ?
<< La plus grande surprise a été la typographie à laquelle on ne s'attendait pas du tout ! On pensait avoir une surface lisse sans trop de structures et en fait on avait surtout un terrain qui est extrêmement riche, qui est fascinant ! >>
Grâce à Philippe Kletzkine, ancien responsable du projet Philae pour l'ESA, nous apprenons que la comète << dégaze beaucoup dont environ l'équivalent de deux cuillères à soupe d'eau/glace chaque seconde. D'ailleurs, les puits de dégazage intéressent beaucoup les scientifiques et c'est une des raisons du choix d'atterrissage / acométissage de Rosetta qui en possède beaucoup à proximité. >>
Francis Rocard nous explique une grande première de cette mission : << On a trouvé pour la première fois un acide aminé sur une comète : de la glycine. >>
<< On a trouvé aussi de l'oxygène moléculaire qui s'est formé dans de minuscules grains de glace. >>
Nicolas Biver qui travaille sur l'instrument MIRO nous parle de la composition de la comète et des saisons sur celle-ci.
Pierre Drossart du LESIA et responsable de l'instrument VIRTIS
<< Cette dernière séance est pour moi très émouvante - je travaille sur ce projet depuis plus de 20 ans ! >>
Il nous explique le phénomène de dégazage et de jets de poussières de la comète.
Nicolas Fray, Maître de conférence au LISA aborde un sujet hautement technique au niveau de la chimie de la comète mais Ô combien passionnant (comme dirait Gilles Davidowicz, ça donne envie de reprendre des cours de chimie).
Il nous parle de la chimie organique, des molécules gazeuses, du concept du fameux ''zoo cométaire'' (j'ai tout compris maintenant), bref de toute la diversité chimique de 67P.
<< Il y a de la matière organique sur le noyau. Grâce à Rosetta, on est passé de 20-25 molécules connues sur les comètes à plus de 60 aujourd'hui ! >>
(Nicolas Fray commentant une photo prise par Rosetta lors de sa descente - ici, à 16 km du sol) |
Marc Chaussidon, Directeur de l'Institut de Physique du Globe nous explique pourquoi il faut étudier les comètes, << (...) connaissance indispensable si on veut comprendre la formation du système solaire. >>
Thierry Martin du SONC nous explique tout ce qu'il ya à savoir sur la dynamique de vol et sur la problématique de se poser sur une comète.
Jan Wöerner, directeur de l'ESA, Jean-Yves Le Gall, Président du CNES et de l'IAF, et Pascale Ehrenfreund, directrice de la DLR, ont tous les trois adressés leurs voeux de réussite à Rosetta en direct depuis Guadalaraja au Mexique où ils se trouvaient pour le 67ème Congrès de l'IAF.
Jean-Loup Bertaux du Latmos nous a longuement expliqué la composition des comètes et leurs noyaux et aussi, et surtout, de la composition de 67P qu'il << adorerait manger - elle est d'une texture plus proche de la meringue que du gâteau basque. >>
Il nous a expliqué aussi qu'il y a eu de nombreux effondrements de falaises sur la comète et que c'était << absolument fascinant de voir ce monde qui se dessinait et redessinait sous leur yeux grâce à Rosetta. >>
(Holger Sierks, responsable de la caméro OSIRIS nous montrant une mosaïque brute de photos prise à 1 000 mètres d'altitude par Rosetta) |
<< J'ai eu la gorge serrée quand le signal a disparu, quand le signal s'est éteint. C'est la fin d'une formidable aventure collective, scientifique, humaine. >>
<< Il y en a pour plus de dix ans de travail d'analyses de données avec Rosetta. J'ai travaillé sur les données de la comète de Halley (en 1986), et nous avons eu dix ans de travail, alors là, imaginez la somme d'informations et de données reçues pendant les deux ans de la mission de Rosetta en orbite. >>
La fin de cette séance nous a permis de découvrir de fabuleuses images en 3D de la surface de 67P/Tchurioumov-Gerasimenko grâce au travail incroyable d'Olivier de Goursac.
(Nicolas Biver et Jean-Loup Bertaux commentant la dernière photo de Rosetta) |
Outre l'aspect scientifique, un des autres grands succès de la mission Rosetta / Philae est l'intérêt suscité auprès du public. Et le public présent ce jour-là a aussi été très ému lorsque la fin de mission a pris physiquement forme avec ce tracé plat...
Crédit : Stéphane Sebile / Spacemen1969
Space Quotes - Souvenirs d'espace
Géraldine G. (envoyée spéciale pour vous)
ESA / CNES / DLR
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