Philippe Gaudon est pour le CNES, le chef de projet de Philae.
Interview / questions posées par Charlyne, 10 ans, lors de la journée spéciale du vendredi 30 septembre 2016 à la Cité de l'Espace à Toulouse pour la fin de la mission Rosetta.
Pensez-vous qu’aujourd’hui les objectifs de cette mission soient
pleinement atteints ?
Oui, les objectifs de la mission sont
totalement atteints.
C’est-à-dire qu’on avait 22 instruments
scientifiques, 12 sur la sonde Rosetta, 10 sur l’atterrisseur Philae, tous ont
bien fonctionné. Et sur Rosetta, ils ont fonctionné pendant 2 ans et demi, donc
on a des montagnes de données qui sont arrivées sur la Terre et qu’on va exploiter.
Et on va savoir grâce à ça, la forme de la comète, mais aussi la composition,
la température, le niveau de dégazage, l’interaction avec le vent solaire, et
de toutes ces données, on va savoir ce qu’est vraiment une comète.
Quels sont les problèmes auxquels vous avez dû faire face lors de
cette mission ?
Il y a eu beaucoup, beaucoup d’étapes. C’est-à-dire
que malgré une fusée extrêmement puissante qui s’appelle Ariane pour nous
lancer, la vitesse était totalement insuffisante pour arriver à la comète. Il a
donc fallu survoler plusieurs planètes pour s’élancer, ça s’appelle l’effet de
fronde, et grâce à ces survols de la Terre par 3 fois, et de Mars, et bien on
est arrivé à aller vers la comète, ce qui fait, qu’on a passé 10 ans dans une
phase dite de croisière pour arriver jusqu’à la comète.
Et une fois qu’on était là, on a
découvert sa forme qu’on ne connaissait pas, car on ne connaissait presque rien
de cette comète avant notre arrivée sur place. On a appris à connaitre cette
comète très rapidement et à déterminer l’endroit où on va aller se poser dessus,
donc il y avait ce challenge-là. Et puis après, c’est le challenge de Philae, pour
arriver à se poser à l’endroit prévu. Alors là, on a un petit peu raté les
choses, on a touché le sol à l’endroit prévu, mais il y a 2 systèmes qui n’ont
pas fonctionné, alors on a rebondi et on s’est retrouvé un peu les pieds en
l’air à la surface de la comète un peu plus loin. Donc ça c’était un gros
challenge.
Pourquoi avoir coupé tous
les systèmes de Rosetta au moment de son posé ? Ne pas avoir gardé (ou
tenté de garder) une quelconque communication après son posé ?
C’est vrai, moi j’aurai bien aimé qu’on
essaie de continuer, mais avec la trajectoire qu’on avait aujourd’hui pour
aller taper la comète, de toute façon, même si on n’avait rien fait, la sonde se
serait cassée, et donc elle se serait éteinte d’elle-même. Je ne crois pas qu’elle
pouvait survivre dans ces conditions-là, il aurait fallu changer la trajectoire
d’atterrissage pour qu’elle survive à la surface.
Quels sont vos sentiments
personnels, que ressentez-vous maintenant que la mission Rosetta est terminée,
et après tant d’années de travail sur ce programme, que vous reste-t-il,
aujourd’hui, de cette mission ?
J’ai un peu de mal à réaliser... moi, ça
fait 15 ans que je travaillais dessus, et on a travaillé avec des évènements
marquants, l’arrivée à la comète, l’atterrissage etc…, j’ai donc l’impression
que dans 3 mois ou dans 6 mois, il va y avoir à nouveau une nouvelle étape, et ce
n’est pas le cas, donc aujourd’hui, je suis triste, mais je n’arrive pas à le
réaliser. Mais je pense que dans quelques semaines, quand on ne parlera plus du
tout de Rosetta, plus du tout de nous, là ça y est, ce sera la fin de la
mission et je serai encore beaucoup plus triste.
Qu’allez-vous faire
maintenant, sur quel programme allez-vous travailler ?
Personnellement, je vais commencer à
travailler non pas sur un projet unique, car j’essaie de mettre au point de
nouveau projets d’exploration de planète, de comètes, d’astéroïdes ou
d’observation lointaine, d’exo planète etc…
Je suis responsable de rechercher de
nouveaux projets, et c’est très compliqué de les faire, parce qu’il faut les
faire en coopération avec beaucoup d’autres pays, et que ça coute très cher,
donc c’est compliqué.
Combien de temps prend une communication entre Rosetta et la
Terre ?
C’est très variable parce que ça dépend
de la distance entre la comète et la Terre. Donc entre Rosetta et la Terre aujourd’hui,
c’était 40 minutes. Il faut savoir que par exemple entre la Terre et la lune,
c’est 1 seconde, seulement la communication, et là c’est 40 minutes, donc nous
étions 40 fois 60 fois plus loin que la Lune.
Peut-on envisager d’envoyer des sondes du type de Rosetta plus loin
dans l’univers, en restant en communication ?
Oui, parce qu’on a l’exemple les sondes
Voyager lancées par la NASA dans les années 80, et elles continuent à survivre.
Et elles continuent à survivre parce qu’à l’intérieur on a mis une petite source
radioactive, qui donne de l’électricité tout le temps. Si on avait envoyé Rosetta
plus loin, malgré ces énormes panneaux solaires, elle ne pouvait
plus fonctionner parce que le soleil devenait comme une étoile, trop petite. Mais
c’est tout à fait possible.
Les sondes comme Rosetta fonctionnent grâce à des panneaux solaires
qui ont montrés leurs limites. Des recherches sont-elles menées pour trouver
une autre source d’énergie afin d’y pallier ?
L’autre source d’énergie qu’on connait
actuellement, c’est surtout l’énergie nucléaire. Donc, il suffit de pas
grand-chose, une toute petite source radioactive, pour générer à la fois de la
chaleur et de l’électricité. C’est surtout à ça qu’on pense pour remplacer les
grands panneaux solaires.
Crédit : Interview de Charlyne Mallet (10 ans)
Arnaud et Céline Mallet
Stéphane Sebile / Spacemen1969
Space Quotes - Souvenirs d'espace
Remerciements à Florence Seroussi de la Cité de l'Espace
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