mardi 26 novembre 2013

25ème anniversaire de la mission Soyouz TM-7 Aragatz / 1988 - 2013




Le 26 novembre 1988, il y a exactement 25 ans, en fin d’après-midi (heure locale), décollait la mission Soyouz TM-7 / Aragatz.
A bord de la capsule Soyouz se trouvent les cosmonautes Alexandre Volkov, Commandant et 2ème vol, Sergueï Krikalev, 1er vol, et le français Jean-Loup Chrétien, premier français dans l’espace qui effectue là son second vol.
 

La mission s'appelle Aragatz, en hommage au Mont Aragatz en Arménie, qui était le lieu où fût signé l'accord pour ce deuxième vol spatial européen. On peut lire parfois aussi la dénomination VLD comme Vol de Longue Durée.
 
Le décollage, originellement prévu le 21 novembre, a été décalé au 26 novembre, afin de permettre au Président de la République Française François Mitterrand d’assister au décollage.

(FDC Départ CNES signé par Jean-Loup Chrétien)

Après 2 jours de vol, l’équipage s’arrime à la station spatiale MIR le 28 novembre.
Ils rejoignent l’équipage résident composé de 3 cosmonautes, ce qui fait qu’il y aura 6 personnes à bord de MIR pendant presque un mois.
L’équipage résident se compose de Valery Poliakov, de Vladimir Titov et de Musa Manarov. Ces deux derniers sont dans l’espace depuis 11 mois.

La mission n’a pas été ‘’de tout repos’’ car MIR alors était encore petite. L’espace à bord n’était pas prévu pour 6 personnes. L’encombrement du matériel emporté par les Progress (notamment pour les expériences françaises) a été très gênant, et tous les ports d’attache de MIR étaient occupés.

(Enveloppe ayant voyagé dans MIR signée par Jean-Loup Chrétien)
 
Le 9 décembre 1988, Jean-Loup Chrétien et Alexandre Volkov effectue une EVA d’une durée de 5h57. Jean-Loup Chrétien devient ainsi le premier français et le premier non-russe ou non-américain à effectuer une EVA.
Des tests lors de cette sortie extravéhiculaire ont été effectués dans le cadre du programme européen Hermes (qui sera abandonné au début des années 1990). Une structure déployable, ERA, a également été testée. Celle-ci ne se déployant pas, Alexandre Volkov donna un coup de pied dedans, avec succès.

 
Le 21 décembre 1988, après un vol de 24 jours et 18 heures, Jean-Loup Chrétien retourne sur Terre à bord de la capsule Soyouz TM-6, avec les cosmonautes Titov et Manarov, qui battent ainsi le record de durée dans l’espace, à l’époque, en étant restés en orbite 365 jours et 22 heures !

 

Quelques photos de Jean-Loup Chrétien en vol et à l'entrainement.


Le Logo de la mission spatiale est l’œuvre de l’artiste Didier Bécet. Il sera repris pour un timbre français commémoratif en mars 1989 (voir le sujet ici : )

(1er Jour du timbre signée par l'artiste Didier Bécet et par Jean-Loup Chrétien)
Le scaphandre Sokol utilisé par Jean-Loup Chrétien est entreposé au CNES, à Paris, et est présenté ponctuellement au public lors de certaines manifestations. La dernière fois, c’était lors du Salon Philatélique au Parc Floral de Vincennes en 2012 (sujet ici :

La capsule, Soyouz TM-7, se trouve au Musée de la Cosmonautique à Moscou :
http://souvenirsdespace.lebonforum.com/t137-capsule-soyouz-tm-7-jean-loup-chretien-mission-aragatz-1988

Voir aussi la longue interview de Jean-Loup Chrétien accordée à Space Quotes – Souvenirs d’espace, où il parle, entre autre, de la mission Aragatz
http://spacemen1969.blogspot.fr/2010/02/rencontre-avec-jean-loup-chretien.html

 Jean-Loup Chrétien parle aussi de cette mission et des autres dans plusieurs ouvrages :
http://souvenirsdespace.lebonforum.com/t9-les-livres-ecrits-par-jean-loup-chretien-ou-en-collaboration-avec


 

mardi 12 novembre 2013

Disparition du cosmonaute Alexandre Serebrov (1944 - 2013)

Nous avons appris, ce mardi 12 novembre 2013, la disparition du cosmonaute Alexandre Serebrov qui s'est éteint soudainement cet après-midi dans son domicile à la Cité des Etoiles à Moscou. Il avait 69 ans.

 
Né le 15 février 1944 à Moscou, Alexandre Serebrov est diplômé du Moscow Physics Technological Institute. Il travaille ensuite chez Energia en tant qu'ingénieur pour le programme spatial.

En 1978, il est sélectionné comme cosmonaute.

Il effectuera 4 missions spatiales :

- Soyouz T-7 : 19 au 27 août 1982
- Soyouz T-8 : 20 au 22 avril 1983
- Soyouz TM-8 : 5 septembre 1989 au 19 février 1990
- Soyouz TM-15 : 1er juillet 1993 au 14 janvier 1994

Il passera en tout 372 jours dans l'espace.
 
Sa première mission, Soyouz T-7, a lieu du 19 au 27 août 1982, avec les cosmonautes Leonid Popov et Savitskaïa. L'équipage s'amarre à Saliout 7.
 
L'équipage revient sur Terre à bord de la capsule Soyouz T-5.

(Alexandre Serebrov à bord de Saliout 7 lors de la mission Soyouz T-7)
(Timbre hommage russe de la mission Soyouz T-7)

Le 20 avril 1983, il part pour sa seconde mission avec les cosmonautes Vladimir Titov et Gennady Strekalov pour la mission Soyouz T-8. Le but principal de la mission était de s'amarrer à la station Saliout 7 afin de réparer un panneau solaire. Mais à cause d'un problème d'antenne, l'amarrage ne put avoir lieu (même en manuel) et la mission rentra sur Terre au bout de deux jours.

(Enveloppe signée par l'équipage Soyouz T-8)

Il décolle pour sa troisième mission le 5 septembre 1989 pour une mission longue durée à bord de MIR avec Alexandre Viktorenko, mission Soyouz TM-8, où l'équipage devient le 5ème équipage résident sur MIR (d'où aussi l'appellation MIR 5).
 
L'arrimage se fit de façon manuel à cause d'un disfonctionnement du système de rendez-vous Kurs.
 
L'équipage s'occupa aussi de s'occuper de la mise en route du module Kvant-2, arrivé le 6 décembre.
 
Il y eut 5 EVA lors de cette mission. Lors de la 4ème, le 1er février 1990, Serebrov testa le fauteuil spatial russe Ikar (ou Ikarus) et s'éloigna à 33 mètres de MIR (mais il y avait un câble de sécurité relié à MIR au cas où). Viktorenko testa Ikar lors de la 5ème EVA et s'éloigna de 45 mètres.
 
L'équipage revient sur Terre le 19 février 1990 après 166 jours dans l'espace.

 
 Pour son 4ème et dernier vol, Serebrov s'envole le 1er juillet 1993 avec l'équipage de Soyouz TM-17 Altair, Vassili Tsibiliev et le français Jean-Pierre Haigneré. Après le départ d'Haigneré, Tsibiliev et Serebrov deviennent le 14ème équipage résident de MIR.
 
Le 14 janvier 1994, l'équipage quitte MIR pour se préparer à retourner sur Terre. Il est prévu que l'équipage fasse une inspection et des photos autour de MIR, et principalement du module Krystall. Lors de la manœuvre, la capsule Soyouz TM-17, pilotée par Vassili Tsibiliev, percute le module Krystall. Plus de peur que de mal, mais l'équipage peut rentrer sans encombre sur Terre le jour même après 196 jours de vol.

 
Alexandre Serebrov était un des astronautes / cosmonautes les plus expérimentés et avait à son actif 10 sorties extra-véhiculaires(EVA).

Il quitte le corps des cosmonautes en 1995. 
 
Il était venu faire une conférence à Paris en avril 2011, à l'UNESCO, pour célébrer le 50ème anniversaire du vol de Gagarine.

(Crédit : Space Quotes - Souvenirs d'espace / Stéphane Sebile)
 
(Alexandre Serebrov signant quelques photos après sa conférence à l'UNESCO)

vendredi 8 novembre 2013

Interview de l'astronaute Thomas Reiter, actuel Directeur des Vols Habités et des Opérations de l'ESA


Thomas Reiter est un ancien pilote de chasse et pilote d’essais de l’Armée de l’Air allemande.

Egalement ingénieur aérospatial, il est détaché au début des années 1990 à l’ESA et travail sur la navette Hermes et le module Columbus.

En 1992, il est sélectionné par l’ESA comme astronaute, et part s’entraîner à la Cité des Etoiles en août 1993 pour la préparation de la mission Euromir 95.

(Le Groupe ESA de 1992)
Il effectue sa première mission spatiale, donc avec Soyouz TM-22 / Euromir 95 entre le 3 septembre 1995 et le 29 février 1996, où il restera 179 jours dans l’espace. Il effectuera deux EVA lors de cette mission.

Il effectue sa deuxième mission spatiale du 4 juillet au 22 décembre 2006 avec  Expedition 13 / 14 Astrolab (aller et retour en navette / vols STS-121 et 116). Il restera 171 jours dans l’espace.

Il totalise en tout 350 jours dans l’espace. Il est le non-américain ou non-russe qui est resté, à ce jour, le plus longtemps dans l’espace.

Depuis avril 2011, il est le Directeur des Vols Habités et des Opérations (D/HSO) de l’ESA à l’European Astronaut Center de Cologne.

Interview réalisée en novembre 2013

How many years were you connected to the space program prior to your 1st spaceflight?

I was appointed to ESA's Astronaut Corps based at the European Astronaut Centre (EAC) in Cologne in 1992.

After completing my basic training I was selected for the 95th Euromir mission.

The according preparation began in August 1993 in Swjosdny Gorodok ("Star City") in the vicinity of Moscow. This is where I prepared for extra-vehicular activities in open space and trained to operate the Soyuz capsule.

 Appointed as flight engineer on board the MIR space station, I also had to undergo some onboard-engineer tasks.

How did you feel prior to the flight ?

Preparing for my first mission was an exciting time.

Everything I learned was a completely new territory for me. Every day was associated with new challenges and the joy for my first flight was constantly growing.

What kind of sensations did you experience during take-off ?

The training phase prepared us for many things, but not for the view out of the window, looking at Earth.
Even when one has seen  many photos  taken from space, reality is something completely different - the numerous colours, the arc of the horizon, the thin shell of atmosphere.

I got to know the feeling of gravity during the parabolic flights I took before my mission, but in this context the sensation only lasts for 30 seconds.

It was therefore something totally new to experience this feeling on an ongoing  basis throughout a period of six months, a feeling which I had to get used to.


What does weightlessness feel like, and what did you think about during the flight?

There is a lot you need to learn in weightlessness, especially about your own movements.
You have to spend much less energy and be more careful with everything.
Once you get used to it however it is fun to work in zero gravity.

During the flight I felt constantly thrilled to have the opportunity to work on a space station and conduct experiments in a new environment. The highlights during my first flight were of course the two EVAs in space during which I could see Earth directly through the glass of my helmet.

What were some of the problems you encountered and how did you fixed them?

Of course we had a few little issues on board, just like we would have had some on earth too.

As an astronaut it is necessary to be able to react to any situation without outside help.

I once recovered an experiment with the strings of my guitar for example, to the delight of the scientists on Earth. Reliance on the team on board is also indispensable.

My experience in space has shown me that only human beings, thanks to their skills and competences, are able to react to unforeseen situations.

(L'équipage Euromir 95 avec l'équipage de STS-74 qui a pris cette photo de MIR)

What did you eat, and did it taste real?


Before my flight, I had the chance to choose my meals for the mission according to my taste.
In weightlessness however the taste buds work differently than on Earth and you get the feeling that you need to have much more salt.

I was always especially looking forward to the arrival of the re-supply spaceship as it always had fresh fruit on board.

What was re-entry like ?

Since your muscles regress during the flight you have to do at least two hours of exercise every day while in space.

The re-entry is the first step towards readaptation to Earth’s gravity.

During the return flight the increasing gravity is spread over the entire body.

Once you are back on Earth you then have to learn how to deal with gravity again. It takes about a couple of days to get used to it again.

Were you glad to be back on Earth, or did you feel you could have spent the rest of your life up there ?

The feeling of weightlessness is unique.

Once you know it, you would like to experience it again and again. But not only that, the view of Earth from space is also unforgettable.

I miss these two aspects. However, after half a year in space it is great to return to Earth, to my family and friends.