Rencontre avec John H. Griffith (né le 19 mai 1921), ancien pilote d'essai du NACA qui a piloté le X-1, X-4, D-558-1 et D-558-2.
Souvenirs recueillis en décembre 2003
Pouvez vous nous parler un peu de vous et nous dire comment vous avez été engagé comme pilote d’essai par le NACA ?
Je suis originaire de l’Illinois (Homewood).
Après mes études, je rentre en 1941 dans l’Army Air Corps (avant que celle-ci ne devienne l’US Air Force) et j’effectue près de 200 missions de combat en P-40 en Nouvelle-Guinée lors de la 2ème guerre.
En 1946, je reprends des études d’ingénieur aéronautique à l’Université Purdue et je rejoins le NACA en 1948 au Laboratoire Lewis à Cleveland puis devient pilote d’essai à Muroc en 1949 (aujourd4Hui Dryden).
Comment se déroulait un vol-type de XS-1 ?
Très tôt le matin, nous remplissions les réservoirs du X-1 avec le carburant (oxygène liquide, nitrogène, alcool) afin d’éviter les risques causé par la chaleur, car il faisait très chaud à Muroc. Ensuite le XS-1 était amené à une fosse afin d’être accroché sous le B-29 comme une bombe.
Après le décollage, lorsque nous avions atteint une altitude de 3000 mètres, je me glissai dans le cockpit du X-1. Si vous avez vu The Right Stuff (l’Etoffe des Héros), vous constaterez que ce n’était pas sans risques. A l’intérieur, je m’harnachais, me sanglais, et passaiS toute la check list et les procédures preflight en revue. Le temps était compté… Il fallait que je sois prêt lorsque nous atteignons la zone de largage. De toute façon, prêt ou pas, le pilote nous aurait largué (rires…).
A environ 9 000 mètres, j’étais largué… J’allumai 2 de mes moteurs et grimpait très vite à près de 17 000 mètres. Puis commençait la descente à Mach 0.8. J’allumai ensuite les autres moteurs.
Le pilotage était assez ‘’costaud’’ jusqu’à Mach 1, Mach 1.2 car l’avion était lourd à cause du carburant qu’il emportait. Lorsque nous avions épuisé tout ce carburant, le pilotage redevenait un peu plus facile. Durant cette phase propulsée, je faisais plein de manœuvres afin de tester l’appareil (G, roulis, virages, stabilisation, etc…).
Je redescendais et atterrissais sans moteur, comme un planeur (glide phase).
Piloter le X-1 reste un de mes grands moments de ma vie de pilote.
Vous avez piloté d’autres X-Planes, qu’en pensiez-vous ?
J’ai eu la chance de piloter d’autres X-Planes en un temps très court.
Durant un peu plus d’un an, j’ai piloté 9 fois le X-1, 7 fois le X-4 dont j’ai effectué le 1er vol NACA, 16 fois le D-558-1 et 8 fois le D-558-2. C’était à chaque fois des avions exigeants mais remarquables par leur conception.
Il faut savoir que chacun de ces avions était différent car ils avaient un rôle différent et spécifique. Le pilotage était donc différent, mais quel plaisir…
Après avoir quitté le NACA, qu’avez-vous fait ensuite ?
Je suis devenu Chef-pilote d’essai chez Chance Vought où j’ai participé au développement du F7U Cutlass. J’ai aussi été chef-pilote d’essai et chef-instructeur chez United Airlines.
J’ai travaillé avec la FAA sur le projet d’un avion de ligne supersonique avant que le projet soit annulé et qui devait concurrencer le Concorde. Et maintenant, je suis un paisible retraité qui s’occupe de lui-même (Rires…)